Dernières nouvelles du voile

Deux bonnes nouvelles pour les partisans du voile islamique à l'école et autres lieux !

La première, c'est que le second de Ben Laden en personne, AYMAN AL-ZAWAHRI (ça valait de l'écrire en majuscules) vient de condamner la France pour sa loi contre le voile (entre autres signes religieux), et la menacer pour ce crime contre la liberté qui lui est aussi chère que les respect qu'il porte aux femmes, d'un "11 septembre" à sa mesure. Du coup on a renforcé en Hongrie les gardes du corps de Chirac.
La seconde, c'est que l'illustrissime philœusophe, ALAIN BADIOU (cap.id.), a eu droit à une page entière du Monde pour pourfendre les adversaires dudit voile.
Ces bonnes nouvelles, qui auraient pu échapper aux intéréressés, seront, nous l'espérons, bien faites pour réjouir les filles Lévy et autres fidèles du Prophète Mahound et de son Coran (sans versets sataniques). Mais notre grand compatriote vaut qu'on s'attarde à ce qui va devenir la plus belle page de son œuvre, et sûrement lui ouvrir les portes de l'Académie française.

Les badineries de Badiou

Dira-t-on, à lire son pathos, que la philosophie est mal partie, et qu'en fait de philosophie, c'est-à-dire d'apport d'un penseur censé ajouter quelque chose à l'intelligence du monde, on n'a là que l'élucubration d'un petit prof de philo, tout pareil aux BLH & C°, qui tous se parent du haut nom de philosophes pour impressionner le public.
Ne chicanons pas ! D'autant que pour faire sérieux, il a écrit son pensum en 32 thèses. Plusieurs des premières sont d'une grande profondeur : "ou bien, ou bien, ou bien". Lui, le penseur, il ne sait pas si c'est ci ou ça, voire autre chose qu'il oublie. Et ça n'a d'ailleurs aucune d'importance, puisque, de toute façon, on punit injustement de pauvres filles pour le port d'un bout de chiffon. Mais pourquoi leur fait-on cela ? D'abord, il fait l'imbécile : parce qu'elles cachent leurs cheveux ! Alors, pourquoi ne pas montrer les sexes ? Comme ses élèves doivent rire quand le savant professeur fait des plaisanteries aussi fines, avant de passer gravement au sérieux : mais non, voyons, la cause de cette "persécution", c'est… LA PEUR ! Qui a peur ? Mais, voyons, moi, vous, le petit citoyen occidental "jouisseur, amer, cramponné à un système politique dont tout semblant de vérité est forclos" (thèse 24), et les "Occidentaux en général et Français en particulier" (thèse 28). Pas moyen de se méprendre, c'est bien nous... mais pas lui. Car un philosophe n'est ni Français, ni Occidental, ce qu'il prouve en n'ayant pas PEUR. Il n'est aussi d'aucune classe : il est dans le Ciel de la Pensée pure. Par rapport à lui, il y a le tas de tous les autres : ceux qui écrasent les peuples de bombes, ceux qui marchandisent le monde, et en particulier le corps des femmes, mais qui ne font rien contre les proxénètes, et... vous, et moi. Tout ça, c'est du pareil au même : des Occidentaux, Français en particulier. Mais c'est tout de même un homme d'idées radicales que le philosophe Badiou, quoique contre "les âneries soixante-huitardes". Et de t'étaler sa science, de citer du Lacan et du Lévinas ! Et de te fustiger l'élu à 82%. (Mais que pense-t-il de la Constitution de la Ve République, qui était faite pour en arriver là ?) Et il est même féministe en plus ! Mais pas du féminisme de ces filles de "Ni putes ni soumises", dont il n'a que faire de l'enfer qu'elles ont souffert avant de se libérer. Non ! A elles, il explique doctement — thèse 18 — que les putes sont soumises, et que les "non-soumises (un lapsus révélateur lui a fait écrire "soumises") "ne sont peut-être que des putains privées." Parfait cartésien (là, bien franchouillard), il oppose la dualité de la charia et de la pornographie marchande. Mais, ô sagesse philosophique ! il les renvoie dos-à-dos. Lui, du haut de son empyrée, il est pour laisser le monde aller comme il veut, et les vaches seront bien gardées.
Et la réalité sociale et politique là-dedans ? Ce n'est pas du domaine de la philosophie. Alain Badiou n'est certainement jamais allé dans un quartier ou une banlieue, où les militants sociaux affrontent le problème de l'offensive islamiste, dans une école où le prosélytisme du voile se fait arrogant contre les enseignants, insultant et manaçant contre les filles impudiques qui ne sont pas voilées. Du haut de sa chaire et du fond de son cabinet, on ne connaît les problèmes sociaux et politiques que comme des phantasmes. Un cartésien sait bien que toute réalité est dans l'âme, et que le reste n'est rien.

Mais la JCR avec ça ?
Un vieux marxiste, qui ne renie pas son trotskysme, ne peut se taire après qu'une organisation qui s'appelle Jeunesse communiste révolutionnaire ait défilé sous son drapeau avec les barbus défenseurs du voile islamique. D'autant que, si cette organisation est autonome par rapport à son organisation mère, la LCR, on a vu marcher dans ses rangs des membres dirigeants de celle-ci, et non des moindres. Certes, il y a déjà un certain temps que cette LCR a répudié la discipline majoritaire léniniste, mais, semble-t-il, en "jetant l'enfant avec l'eau sale du bain": en même temps que le refus d'expression publique des minorités en tant que telles, celui du droit de dire n'importe quoi, n'importe où au nom de l'organisation. Et il apparaît bien que ce laxisme entraîne quelque gêne jusqu'au sommet de sa direction quand on entend son porte-parole, Olivier Besancenot, s'embrouiller et se prendre les pieds dans le tapis pour répondre à la question du voile, lors de son débat avec Marine Le Pen.
Comment comprendre cette aberration, qui risque de porter le plus grand tort au crédit accumulé de la LCR, sans même parler de ses effets possibles lors des prochaines échéances électorales ? De l'extérieur, la chose est incompréhensible.
Une piste s'ouvre en visitant le site de cette JCR. Une politique d'ouverture, apparemment tout azimut, a conduit la Ligue a accueillir récemment un groupe nommé "Socialisme par en bas", et il semble bien que c'est ce groupe qui a colonisé la JCR. La lecture des textes publiés sur son site révèle un courant du pire type "gauchiste", cette maladie infantile du communisme. On en trouve tous les aspects développés sur la question du voile et de l'islamisme :
1/ le dogmatisme : les problèmes politiques sont abordés à partir des "textes sacrés", où la réalité doit entrer de force comme sur un lit de Procuste. Dans le cas du voile, les textes bolcheviques sur les rapports avec les pays islamistes, au temps de la Révolution. Quel rapport avec nos problèmes ? Aucun ! Mais si Lénine a dit que...
2/ L'abstraction : les analyses ne partent pas du concret. On ne s'y réfère même pas, mais à des "principes" généraux abstraits. Y a-t-il, oui ou non, une offensive islamiste dans les milieux musulmans, qui passe en particulier par l'offensive du voile ? La question ne sera pas posée.
3/ Le dualisme : la nouvelle division du monde en deux, par la volonté du super-impérialisme, n'est pas contestée comme mystification, mais les valeurs de Bien contre le Mal sont simplement renversées. Puisque l'on est contre les impérialismes, on est pour ses adversaires, sans prendre garde que, dans cette guerre des Monstres, le jeu des Islamo-pétroliers consiste précisément à lier des causes justes, comme celle des Palestiniens, à leur cause, aussi sale, réactionnaire et inhumaine que celles des Grandes Puissances.
4/ La surdité : pas de débats ! Un seul son de cloche. Un silence méprisant à l'égard des femmes en lutte contre "la loi des mâles". Pas d'interrogation sur le retour du "religieux". Sur rien, à vrai dire. Des "vérités" toutes faites assénées. La pensée sectaire, dogmatique, se distingue par sa fermeture sur elle-même, comme celle des religieux, précisément.
Un cancer est un corps étranger qui se développe dans un organisme et peut le tuer s'il n'est pas opéré. La LCR risque gros si elle ne s'opère pas de ce cancer sectaire-dogmatique là.

Et l'offensive des autres religions ?
On y viendra la semaine prochaine, avec la priorité du film de Mel Gibson … Et en attendant, chantons en chœur :

À LA NICHE LES GLAPISSEURS DE DIEU !