1er février 2005

rapport du
NON !
à
Auschwitz

Quel rapport peut-il y avoir entre le traité constitutionnel néo-libéral que l'on nous appelle à voter et la mémoire d'Auschwitz ? Ne voilà-t-il pas du délire !
Pas du tout si l'on remarque un vide étrange dans le soixantenaire de la "libération" du plus effroyable des camps de la mort, qui a pourtant rempli toute une semaine les pages des quotidiens, et monopolisé les écrans de télé pour les images de chefs d'Etats, tous plus tristes les uns que les autres, et prônant un plus jamais ça!
Un petit vide grand comme un gouffre : LA CAUSE !
Certes, on a bien évoqué le nazisme. Mais d'où sortait donc cette monstruosité ? M. Schröder a trouvé : c'est le MAL ! La haine… une idéologie ! Et il nous a mis en garde : Il faut veiller aux droits de l'homme ! Oui, mais…
D'où sortait-il donc ce nazisme ? Du peuple allemand ? On n'ose plus, comme hier, le dire ouvertement, mais on le suggère, et du coup M. Schröder est obligé à un : "Non ! Mais un peu oui pour hier. Et en tout cas pas du peuple allemand d'aujourd'hui." C'est si facile d'incriminer les peuples. Ça dispense d'analyser les phénomènes. Mais lesdits peuples protestent. Alors ?
Donc, pas les peuples tout seuls, mais avec l'"idéologie". Vous savez, ces idées qui se promènent toutes seules dans les têtes, et qui se répandent absolument comme des maladies contagieuses !
Et même un Enzo Traverso, que l'on croyait marxiste, nous ressuscite dans Rouge (!!) Adorno et Horkheimer qui : "interprétaient le nazisme comme aboutissement du rationalisme occidental, une dialectique négative qui avait transformé la raison d'instrument émancipateur en instrument de domination humaine et sociale. Adorno définira la Shoah comme l'expression d''une barbarie qui s'inscrit dans le principe même de la civilisation."
Triste dérive de professeurs au dernier degré de la démoralisation ! A bien regarder l'histoire des idéologies, celle du fascisme est bien plutôt le pourrissement de l'opposition spiritualiste au rationalisme, celle du romantisme de droite qui fut si forte en Allemagne, avec Wagner à son sommet. Mais ce n'est pourtant pas encore là la cause du nazisme, seulement sa couverture idéologique.
Non ! vraiment, il n'y aura eu personne pour nous dire que si l'antisémitisme nazi, poussé jusqu'au génocide, fut la forme particulière du racisme de l'hitlérisme, les racismes sont toujours une partie intégrante des idéologies de droite. Personne pour nous rappeler que le nazisme fut l'idéologie globale adoptée par une classe bourgeoise (allemande), menacée de mort par sa faillite économique et la peur de la révolution, et qui se sauva de cette mort par sa politique de terreur, en particulier en faisant des juifs les boucs émissaires de ses propres crimes.
Personne ne l'a expliqué parce qu'il aurait fallu parler de l'aide que reçu le nazisme, dans les années trente, de la part de parties éminentes de la bourgeoisie européenne et américaine, qui voyaient en lui un ferme rempart contre le bolchevisme.
Mais surtout parce que la bourgeoisie garde toujours sous la main la carte fasciste, au cas où il faudrait avoir recours à elle, comme dernier moyen contre les "classes dangereuses". Et M. Schröder avait à peine fini de parler que sa police protégeait une manifestation nazie contre les manifestants qui furent repoussés au jet d'incendie, tandis qu'en France M. Gollnish, second de Le Pen, recevait le droit de reprendre sa place à l'université de Lyon pour former notre belle jeunesse à son enseignement nazi. Sans parler du Grand Européen Berlusconi, qui gouverne tranquillement avec des néo-nazis plus ou moins maquillés, comme cela s'est fait en Autriche, et peut donc se faire n'importe où dans cette Europe qui ne veut tellement pas qu'Auschwitz réapparaisse!
Si la bourgeoisie mondiale n'est pas encore dans la situation de celle de l'Allemagne des années trente, cela peut venir. Et dans ce cas, soyons sûr que sa barbarie se déchaînera avec autant de férocité que celle du nazisme, avec un racisme qui, pour n'être pas antisémite, mais tel celui de MM. Bush et Sharon, n'aura rien à envier à l'autre.
Et nous voilà ainsi revenus à notre Europe en voie de cristallisation néo-libérale. Le bouclage sans recours qui résulterait d'une victoire du "Oui", en interdisant l'expression démocratique des masses populaires, lui donnerait en revanche tous les moyens de resserrement dictatoriaux, et d'autant plus violents que l'opposition enchaînée s'enragerait.
Ce qui permet de ricaner quand on voit M. Hollande tenter de nettoyer son "Oui" en se frappant la poitrine comme Tarzan, et jurant qu'il va défendre les 35 heures, alors que son "Oui" est fait pour permettre la généralisation à toute l'Europe des semaines de 48, 60, 7O heures des nouveaux arrivant d'aujourd'hui… et de demain.