22 mars 2005

Les esprits s'éveillent !
le
NON !
progresse au rythme de l'information
tandis que le Oui recule dans la désinformation

Panique dans la majorité social-libérale du PS. Le gros Dray s'est avisé que, le 29 mai, ils sont menacés d'un second 21 avril ! Mais cette fois en alliance avec Chirac et non à son profit ! Sans l'avouer, la comparaison est un demi aveu que, comme le 21 avril 2002 a été la sanction des capitulations de Jospin & C° devant le Médef, le 29 mai a les plus grandes chances d'être la sanction du ralliement à l'Europe ultra-libérale des Giscard, Chirac, Schröder, Blair, Berlusconi, Barroso et tutti quanti. Et le pauvre Hollande (maintenant mal nommé puisque les Pays-Bas vont, très probablement, voter aussi Non!), tremblant de ne pouvoir s'élever même à la hauteur d'un Léon Blum de 36, pleure que si le Non l'emporte, c'en sera fait de l'Europe qui s'en ira à vau l'eau. Mais, non, mais non, piteux Hollandais Volant ! C'est seulement le PS qui s'effondrera, à moins, dernière chance qui va lui rester, passer la main à ses dirigeants du Non, et prendre Fabius comme premier secrétaire ! Quant à l'Europe, elle restera comme devant, mais ouverte au renversement du cours libéral.
Comment vont donc se battre maintenant les oui-ouistes, incapables d'opposer un seul argument à ceux, solides et documentés, des Non, de défendre un seul article de leur pseudo-Constitution arlequine, mais où domine le jaune ? Sans doute en ne donnant la parole à la télé qu'au Non des souverainistes, ce qui leur permettra de dire qu'il s'agit du choix entre la seule Europe possible et le repli nationalisto-chauvin. C'est à cela qu'il importe de répondre pour tous les braves électeurs qui n'ont pas lu une ligne de la Constitution, ou n'en on lue que les généralités vides et en sautant les passages brouillés à dessein.
Mais un nouvel inconvénient pour les oui-ouistes, c'est cette sacrée directive Bolkestein. Chirac qui, à défaut d'intelligence politique, a la plus grande malice politicienne, a compris que ce truc était capable de saper la Constitution et a haussé le ton pour qu'on glisse ce texte ravageur sous le tapis. Mais le Barroso, en réac ringard qu'il est, tempête qu'on n'y touchera pas, sinon, éventuellement, de quelques virgules, et d'autant que les gouvernements de l'Est Otanien y tiennent aussi pour profiter des bas salaires de leurs travailleurs, sans tenir compte que lesdits travailleurs de l'Est européen n'en veulent pas de la directive et de leurs salaires de misère qui vont avec. Le Hollande — toujours lui —, jure que la directive Bolkestein n'a rien à voir avec la Constitution, à croire que lui non plus ne l'a pas lue, en particulier l'article III-145 et ceux qui vont avec (voir article ci-dessous). Le Match de Dassault lui fait l'amitié d'un beau pavé de l'ours au Hollande : sa photo en duo avec Sarkozy. Ça va parler à tous les électeurs de gauche !


Cette semaine nous complétons notre chronique en donnant à nouveau la parole au citoyen Lionel Gouésigoux, qui devient ainsi un des collaborateurs des plus assidus du Journal intempestif.

Les mensonges effrontés
de RAFFARIN aux Français.

La France d’en bas vous répond M. Raffarin.
La France d’en bas et à gauche, puisque c’est du LOT, que je vous interpelle, M. Raffarin.
A lire votre "point de vue" dans le Monde du samedi 5 mars, j’ai comme l’impression que nous n’avons pas le même Traité entre les mains.
La sagesse populaire dit que "plus c’est gros et plus ça passe", mais là M. Raffarin vous poussez le bouchon un peu trop loin. Il faut tout de même avoir un certain culot, et prendre vraiment l’opinion des Français pour une véritable "connerie" selon l’expression du Président de la République française au Salon de l’agriculture, envers un citoyen qui a osé dire, qu’il ne pensait pas comme vous : un citoyen qui n’est pas dans la pensée unique, qui ne respecte pas la vision unilatérale que le matraquage médiatique cherche à nous imposer coûte que coûte.
Écrire un article sans aucune référence concrète au Traité, avec des phrases qui ne parlent que du contexte, et surtout pas du texte, relève du cynisme le plus méprisable. Simple tour de passe-passe qui tente de faire rêver tous ceux qui souhaiteraient une véritable Constitution citoyenne pour Europe.

Le sociologue Pierre Bourdieu avait décidément bien raison d’écrire :

"L’Europe ne dit pas ce qu’elle fait ; elle ne fait pas ce qu’elle dit. Elle dit ce qu’elle ne fait pas ; elle fait ce qu’elle ne dit pas Cette Europe qu’on nous construit, c’est une Europe en trompe l’œil."

Mais si la ficelle est si grosse, elle ne cache ni vos contre-vérités, ni vos énormes mensonges.

1. Un vote d’urgence.

"Les déséquilibres économiques et sociaux multiplient les conflits politiques et aggravent les menaces terroristes" (J.P. R).


Le mot "terroriste", cité dix fois dans ce Traité, n’est pas seulement là pour faire peur mais nous faire "avaler" une politique de sécurité et de défense subordonnée à l’OTAN, dominée elle-même par les États Unis, comme le démontrent clairement les articles suivants :

Article I-41,2 : "…La politique de l’Union au sens du présent article n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres, elle respecte les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains États membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre…".

Article I-41,7 : "…Les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, qui reste, pour les États qui sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instant de leur mise en œuvre".

Ce Traité donne des objectifs bien étranges pour une Europe pacifique, avec son Article I-41,3 : "…Les États membres s’engagent à améliorer progressivement leurs capacités militaires…", en utilisant : l’Article IV-436-b) "…b) tout État membre peut prendre les mesures qu’il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d’armes, de munitions et de matériel de guerre ; ces mesures ne doivent pas altérer les conditions de la concurrence dans le marché intérieur en ce qui concerne les produits non destinés à des fins spécifiquement militaires", dans lequel seul le commerce des armes, échappent à la sacro-sainte loi de la "concurrence libre et non-faussée".
L’engagement des États membres d’améliorer leurs capacités militaires est conforme au rôle que leur reconnaît l’Union européenne à l’Article I-5,1 : "…[l’Union] respecte les fonctions essentielles de l’État, notamment celles qui ont pour objet d’assurer son intégrité territoriale, de maintenir l’ordre public et de sauvegarder la sécurité nationale…"

Un vote d’urgence pour réformer l’OMC afin de la rendre plus juste, osez-vous écrire M. Raffarin, alors que l’Article III-174 prévoit le contraire : "… Au cas où la Commission constate qu'une disparité entre les dispositions législatives, réglementaires ou administratives des États membres fausse les conditions de concurrence sur le marché intérieur et provoque une distorsion qui doit être éliminée, elle consulte les États membres intéressés.
Si cette consultation n'aboutit pas à un accord, la loi-cadre européenne établit les mesures nécessaires pour éliminer la distorsion en cause…".

Un vote d’urgence pour la création d’une organisation mondiale de l’environnement pour une plus grande conscience de la fragilité de la planète (J.P. R),

alors que l’Article II-97 sensé définir la protection de l’environnement tient dans trois lignes d’une rare simplicité évasive : "Un niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de sa qualité doivent être intégrés dans les politiques de l’Union et assurés conformément au principe du développement durable".
Quant à la Charte sur l’environnement (maintenant adossée au contenu du Traité par les Parlementaires français), on apprend qu’elle n’a pas retenu le principe du pollueur-payeur (pourtant énoncé dans l’Article III-233,2), mais seulement le principe de réparation.

2. Un vote politique.

"La Constitution européenne permet à la démocratie politique de retrouver et d’affirmer sa suprématie sur l’organisation administrative" (J.P. R).


Le fondement de la démocratie réside dans la souveraineté populaire, et une des règles élémentaires de toute démocratie est la séparation des pouvoirs. Comment peut-on affirmer dès l’Article I-2 que l’Union européenne est fondée sur les valeurs de démocratie, alors que tout est construit en écartant soigneusement cette souveraineté populaire.
L’Article I-20 : prévoit que "le Parlement européen exerce, conjointement avec le Conseil, les fonctions législative et budgétaire…", mais le Conseil garde l’exclusivité législative dans certains domaines majeurs comme la fiscalité, la protection sociale ou la politique extérieure, où le Parlement n’est que consulté avant décision.
La Commission, organisme non élu et qui n’est pas responsable devant les peuples, cumule les pouvoirs exécutifs, avec en plus une partie des pouvoirs législatifs et judiciaires. Elle est la seule institution européenne à pouvoir proposer des lois selon l’Article I-26,2 : "Un acte législatif de l’Union ne peut être adopté que sur proposition de la Commission, sauf dans le cas où la Constitution en dispose autrement…".
En réalité, la Commission ne laisse aux députés Européens, surtout que le droit d’acquiescer (Articles III-332, III-333 et III-340).
Le Parlement, même s’il est la seule institution de l’Union élue par les citoyens, reste écarté des décisions essentielles. Les parlementaires européens ne sont pas élus à la proportionnelle intégrale, et le sont avec des systèmes différents en Europe, dont celui de la France, modifié afin d’empêcher la représentation des minorités.
En matière budgétaire, l’initiative reste dans le camp de la Commission et du Conseil. Le Parlement n’est consulté que sur la politique étrangère et de sécurité ; il ne peut prendre l’initiative d’une loi.
Si par la suite, le Conseil veut apporter une modification ou une correction à une loi proposée par la Commission, celle-ci peut encore y faire barrage en imposant la fameuse règle de l’unanimité, avec l’Article III-395 : "Lorsque, en vertu de la Constitution, le Conseil statue sur proposition de la Commission, il ne peut amender cette proposition qu’en statuant à l’unanimité, …", ou tout simplement avec l’Article III-396,9 : "Le Conseil statue à l’unanimité sur les amendements ayant fait l’objet d’un avis négatif de la Commission".
Les exemples ne manquent donc pas, pour démontrer que la Commission détient l’essentiel des pouvoirs, alors que les citoyens n’ont aucune prise sur elle.
C’est l’utilisation permanente du "49-3" pour une durée illimitée et la mort par ordonnances de la démocratie.
La réduction du nombre de commissaires représente aussi, un véritable problème qui rendra la France absente d’une Commission sur deux !

"Un droit d’initiative législative par pétition, un million de signatures, est reconnu aux citoyens" (J.P. R).


Certes, l’Article I-47,4 crée un droit d’initiative populaire, permettant à un million de citoyens d’inviter la Commission à faire une proposition dans les domaines où elle dispose de l’initiative, mais cette Commission n’est pas tenue de donner suite.
La Commission fait ensuite ce qu’elle veut. La proposition citoyenne doit en plus, viser "l’application de la Constitution". Ce qui exclut par exemple, toute demande de création d’un service public de l’eau à l’échelle de l’Europe.
Le règlement, la décision, la recommandation, l’avis sont aussi des actes juridiques, comme le précise l’Article I-33.
Une "démocratie participative" si encadrée risque de n’être que théorique et impraticable.


3. Un vote social.

"L’emploi et le progrès social sont constitutionnellement affirmés comme des objectifs de l’Union européenne" (J.P. R).


L’Article I-9,2 indique que "l’Union adhère à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Cette adhésion ne modifie pas les compétences de l’Union telles qu’elles sont définies dans la Constitution". Mais il n’est précisé nulle part qu’elle adhère à la Déclaration des Droits de l’Homme, ni au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, pas plus qu’elle n’adhère aux droits économiques, sociaux et culturels. Et la différence est fondamentale, puisque la Convention européenne ne crée aucun droit collectif ou social, contrairement aux trois autres documents signés et ratifiés par l’ensemble des États qui faisaient partie de l’Union européenne avant l’élargissement à 25, signé le 1er mai 2004. Et ce ne sont pas les seuls textes importants faisant partis de nos réels acquis qui ne font plus partie du Traité proposé (voir : Europe, la trahison des élites par Raoul Marc Jennar. Éditions Fayard ).
On ne peut juger d’un progrès que par rapport à nos acquis et les textes contenus dans le Traité sont bien "inférieurs" à ceux encore en vigueur. C’est donc un net recul et non un progrès social, comme l’affirme M. Raffarin.
Dans les "libertés fondamentales" de la Charte des droits fondamentaux de l’Union de la Partie II du Traité, on relève l’Article II-75,1 "Toute personne a le droit de travailler et d’exercer une profession librement acceptée" ainsi que l’Article II-75,2 "Tout citoyen de l’Union a la liberté de chercher un emploi, de travailler, de s’établir ou de fournir des services dans tout État membre".
Ainsi le "droit au travail", qui est un droit de créance, inscrit dans la Constitution française de 1958, et qui oblige les pouvoirs publics à garantir ce droit, est remplacé par "le droit de travailler" et celui de "chercher un emploi". Cela n’est pas du tout la même chose.
L’Article III-203, prévoit que : "L'Union et les États membres s'attachent, conformément à la présente section, à élaborer une stratégie coordonnée pour l'emploi et en particulier à promouvoir une main d' oeuvre qualifiée, formée et susceptible de s'adapter ainsi que des marchés du travail aptes à réagir rapidement à l'évolution de l'économie, en vue d'atteindre les objectifs visés à l'article I-3 ", c’est celui qui parle d’une "concurrence libre et non faussée". Ainsi le Traité vise à plier les travailleurs aux besoins du marché , et non l’inverse, et à les “ adapter ” au marché du travail pour des emplois toujours plus précaires.
Le Traité affirmant que l’harmonisation des systèmes sociaux se fera par le marché intérieur (Article III-209), "à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres" (Article III-210,2 a), la concurrence "libre et non faussée" des plus mauvaises conditions de travail et de salaires contre les meilleures aboutira à une "harmonisation par le bas", alors que deviennent illégales les luttes sociales pour imposer une véritable "harmonisation" … par le haut.
On ne peut terminer ce chapitre sans revenir sur l’Article II-88, consacré au droit de grève accordé aussi aux employeurs, une sorte de légalisation du "lock-out", c’est-à-dire la fermeture des entreprises, alors que cette procédure est, encore à ce jour, interdite en France.
Quant à votre chapitre où

"l’économie sociale de marché reconnaît le dialogue social en constitutionnalisant les concepts de partenaires sociaux et de sommet social tripartite : elle consacre la spécificité des services publics –à la française-" (J.P. R).

Jamais je n’aurais pu penser qu’une seule phrase pouvait contenir autant de contre-vérités.
La référence à l’"économie sociale de marché ", ne figure qu’une seule fois dans la première partie du texte consacrée aux principes généraux, mais très vite associée à "la concurrence libre et non faussée" dès l’Article I-3,2.
L’adjectif "social" a définitivement disparu dans la troisième partie de ce traité, qui ne compte pas moins de 322 articles sur 448, pour ne laisser place qu’à une "économie hautement compétitive", dans l’Article I-3,3.
J.K. Galbraith dans son livre "Les mensonges de l’économie" (Grasset 2004), nous éclaire sur la formule "économie de marché" : "Comment un mensonge peut-il être innocent ? Comment l’innocence peut-elle escroquer ? Répondre à ces questions est important, car le mensonge proféré en toute innocence, en toute légalité, joue un rôle certain dans la vie privée et le discours public. Mais nul n’en conviendra ouvertement, ni ceux qui le croient, ni ceux qui le disent. L’innocent mensonge n’engendre, notons-le, aucun sentiment de culpabilité ni de responsabilité…", ainsi "…Quand le capitalisme, avec son signifiant historique, a cessé d’être acceptable, on l’a rebaptisé."…par "…la formule économie de marché".
Pour ce qui est des "services publics – à la française", le terme "service public" n’est cité qu’une seule fois dans le Traité, et de façon très anecdotique dans l’Article III-238, mais il faut savoir que la notion de service public est bannie à tout jamais du langage eurocratique, et remplacée par la notion de ou "Service d’Intérêt Général" (SIG), ou "Service Économiques d’Intérêt Général" (SIEG), expressions déjà présentes dans le Traité de Nice, comme celui d’Amsterdam.
Comme l’explique clairement le Livre Blanc de la Commission (page 23) : "elle se réfère aux services de nature économique que les États membres ou la Communauté soumettent à des obligations spécifiques de service public en vertu d’un critère d’intérêt général."
Seule la nature économique justifie l’intérêt porté aux SIG ou aux SIEG, qui peuvent être publics ou privés, ainsi énoncé (page 24) : Le fait que les fournisseurs de services d’intérêt général soient publics ou privés n’a pas d’importance dans le droit communautaire; ils jouissent de droits identiques et sont soumis aux mêmes obligations.
Les SIG ou SIEG sont donc bien éloignés de la notion de service public, ce que la Commission confirme à la page 23 du Livre Blanc : il convient de souligner que les termes "service d’intérêt général" et "service économique d’intérêt général" ne doivent pas être confondus avec l’expression "service public".
Les SIG ou SIEG sont totalement absents de la Partie I du Traité, que ce soit dans les valeurs de l’Union exposées dans l’Article I-2, comme dans les objectifs de l’Union développés dans l’Article I-3.
Ils sont cités une fois dans la Partie II pour y reconnaître un simple droit, comme décrit dans l’Article II-96 : "L’Union reconnaît et respecte l’accès aux services d’intérêt économique général tel qu’il est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément à la Constitution, afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l’Union.
L’expression "reconnaît et respecte" signifie clairement que les SIG ou SIEG ne font pas partie des compétences de l’Union européenne.
Quant à envisager des coopérations entre services publics nationaux, cela n’est pas envisageable car "incompatible avec le marché", comme l’affirme l’Article III-162 : "Est incompatible avec le marché intérieur et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celle-ci .
A ceux qui prônent les "grandes avancées" du projet de "Constitution", on peut comparer l’Article I-16 sur le SIEG contenu dans le Traité de Nice : "Sans préjudice des articles 73, 86, et 87, et eu égard à la place qu’occupent les SIEG parmi les valeurs communes de l’Union ainsi qu’au rôle qu’ils jouent dans la promotion de la cohésion sociale et territoriales.
On constate donc que les SIEG faisaient partie des valeurs communes de l’Union dans le Traité de Nice, comme celui d’Amsterdam, mais ne font plus partie ni des valeurs, ni des objectifs dans le projet de "Constitution", comme l’explique l’Article III-122 : "Sans préjudice des Articles I-15, III-166, III-167, et III-238, et eu égard à la place qu’occupent les SIEG en tant que services auxquels tous dans l’Union attribuent une valeur ainsi qu’au rôle qu’ils jouent dans la promotion de la cohésion sociale et territoriale.

4. Un vote économique.

"L’Europe est exigeante, mais son concours est indispensable aux agriculteurs français comme pour la ruralité" (J.P. R)


Regardons ce que propose l’Article III-227,1 : "La politique agricole commune a pour but :
a) d'accroître la productivité de l'agriculture en développant le progrès technique et en assurant le développement rationnel de la production agricole ainsi qu'un emploi optimum des facteurs de production, notamment de la main d' œuvre;
b) d'assurer ainsi un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui travaillent dans l'agriculture;
c) de stabiliser les marchés;
d) de garantir la sécurité des approvisionnements;
e) d'assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs".
Assurer un "développement rationnel" signifie instituer la généralisation de l’agriculture industrielle, condamnant à mort les "petits" agriculteurs, et la domination des multinationales des organismes génétiquement modifiés, brevetant le vivant et condamnant la bio-diversité.
Quant aux "prix raisonnables", qui détiendra cette “raison”, sinon ceux qui déterminent les prix ?

"Ensemble, nous pourrions faire de l’Europe un territoire économique plus attractif, ce qui est une réponse offensive, la meilleure réponse aux délocalisations. L’emploi en France a besoin de l’Europe" (J.P. R).


Avec 3,5 millions de chômeurs en France, plus de 5 millions en Allemagne, soit plus de 10% de la population active européenne sans travail, on voit bien la réponse de l’Europe face à l’emploi…
Quant à l’Article III-145, il contient le "principe du pays d’origine" de la fameuse Directive Bolkestein, qui permet de payer moins les travailleurs étrangers :

"… Les services comprennent notamment :
a) des activités à caractère industriel;
b) des activités à caractère commercial;
c) des activités artisanales;
d) les activités des professions libérales.

Sans préjudice de la sous-section 2 relative à la liberté d'établissement, le prestataire peut, pour l'exécution de sa prestation, exercer, à titre temporaire, son activité dans l'État membre où la prestation est fournie, dans les mêmes conditions que celles que cet État impose à ses propres ressortissants".
Même si l’examen de la Directive Bolkestein a été repoussée, d’une part, elle n’est pas retirée, d’autre part le Traité comporte pas moins de 8 articles, qui permettent à une telle Directive de trouver toute sa légitimité : III-133, III-144, III-145, III-148, III-166, III-167, III-209, III-210,2a).


5. Un vote culturel.

"La dimension culturelle européenne sera renforcée par la consécration de la diversité culturelle " (J.P. R).


C’est exactement le contraire que l’on découvre avec l’Article III-280,1 et III-280,2 :
" 1. L'Union contribue à l'épanouissement des cultures des États membres dans le respect de leur diversité nationale et régionale, tout en mettant en évidence l'héritage culturel commun.
2. L'action de l'Union vise à encourager la coopération entre États membres et, si nécessaire, à appuyer et à compléter leur action dans les domaines suivants :
a) l'amélioration de la connaissance et de la diffusion de la culture et de l'histoire des peuples européens;
b) la conservation et la sauvegarde du patrimoine culturel d'importance européenne;
c) les échanges culturels non commerciaux;
d) la création artistique et littéraire, y compris dans le secteur de l'audiovisuel".
La culture avait failli être oubliée dans ce Traité, mais cet article vient tout à coup combler ce vide. Est-ce pour affirmer son "exceptionnalité", qu’elle est le domaine de la liberté ? Non, mais pour évoquer un "héritage culturel commun". Quel est le contenu de cette formule ? N’y a-t-il pas en Europe plusieurs cultures qui co-existent ? La culture n’est-il pas un bien personnel que chacun vit et modifie selon ses désirs ? Le côté inquiétant de la formule tient aux exigences des Eglises d’être réintégrées dans le politique et de voir l’Europe redevenir la Chrétienté ? La séparation de l’Eglise et de l’Etat, qui existe dans la Constitution Française est une grande conquête de la liberté de penser. Elle disparaît dans le nouveau Traité Constitutionnel, au risque de faire renaître les guerres de religion.

"Le débat sur l’avenir de l’Europe n’est la propriété de personne. Il dépasse les clivage politiques, sans toutefois les effacer. Il concerne d’abord les générations futures." (J.P. R).


Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) s’oppose fermement à l’égalité du temps de parole entre les deux représentation.
Et vous nous livrez une égalité médiatique à la "sauce" ultra-libérale : 50% d’un cheval d’information du "OUI" et 50% d’une alouette de "NON". Mais c’est vraiment méconnaître le côté fin gourmet des français, qui savent que le pâté d’alouette titre justement son nom du parfum, de la saveur et de la finesse de l’alouette.
Le désarroi et la souffrance des Français sont bien là : ils trouvent leur ressentiment dans l’étalage des profits scandaleux des entreprises françaises (Total + 37%, BNP + 24,1%, Renault + 43%, l’Oréal + 143%), qui distribuent des dividendes exorbitants aux actionnaires tout en bloquant le salaire des employés et refusant l’investissement nécessaire au développement de l’emploi.
Quant aux salaires des PDG ils explosent, la fiche de paie des patrons du CAC 40 a progressé de 23% pour la seule année 2003, mais pas ceux des employés ni des ouvriers.
Nous sommes en état de légitime révolte face à politique économique et sociale dévastatrice de notre gouvernement, dont la majorité des lois est conforme aux objectifs de l’Union européenne. Voilà la vraie raison de la casse sociale, de l’appauvrissement volontaire des Français et de la disparition programmée de nos Services publics.
Nous sommes en état de légitime défense contre le texte de ce Traité qui est un véritable coup d’État idéologique (selon l’expression d’Anne-Cécile Robert du Monde Diplomatique), que l’on veut nous imposer pour une durée illimitée (Article IV-446), alors que nos anciens nous conseillaient, avec modestie et sagesse, dans l’Article 28 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de la Première République française en 1793 : "Un peuple a toujours le droit de revoir, de réformer et de changer sa Constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les autres générations".
Avec pas moins de 448 articles (plus de 340 pages, 36 protocoles et 2 annexes (plus de 390 pages), ainsi qu’une cinquantaine de déclarations, le tout pour plus de 800 pages, on a un texte complexe, confus, et parfois même ambigu. Tout le contraire d’une Constitution dont la vertu essentielle doit être la clarté et la simplicité, afin d’être lue et comprise par chacun.
Mais on ne peut conclure une telle dénonciation sans révéler aux Français que les déclarations contenues dans le Praesidium de la Convention (que l’on nous dissimule), sont annexées et intégrées à la Convention, et dans lequel on peut découvrir ces lignes effarantes sur les libertés :
"II-66 : Toute personne a droit à la liberté et la sûreté" (…) sauf "s’il s’agit de la détention régulière d’une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d’un aliéné, d’un alcoolique, d’un toxicomane ou d’un vagabond (…).
Ou encore sur la vie :

"II-62 : Toute personne a droit à la vie. Nul ne peut être condamné à la peine de mort, ni exécuté", cependant (…) "La mort n’est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans le cas où elle résulterait d’un recours à la force rendu absolument nécessaire (…) pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection (…)".

Voilà établi le droit de tuer les manifestants, baptisés "émeutiers" par les "pouvoirs publics". Ce ne sera plus un assassinat et un crime que la mort de Carlo Giuliani, tombé à 23 ans, sous les balles d’un policier, lors de la violente répression des alter-mondialistes, venus manifester contre la tenue du G8, à Gênes le 20 juillet 2001, et on pourra en tuer d’autres si les puissants se sentent menacés d’être bousculés. Où est donc passé l’Article 35 de notre Déclaration des droits de l’homme, qui dit : "Quand le gouvernement viole les droits des peuples, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs."

Très bientôt, M. Raffarin, les Français, comme tous les Européens, ne seront-ils pas en droit de l’appliquer, si votre pseudo-constitution scélérate passait… comme une corde au cou des peuples.
Pour que mes enfants, mes petits-enfants et mes arrières petits-enfants ne soient pas obligés d’utiliser la violence pour survivre demain, je vote NON et sans aucun regret, car je sais maintenant, qu’une autre Europe est possible, parce qu’un autre Monde est nécessaire.

Lionel Gouésigoux, pour Éduc@ction.
Le 12 mars 2005
http://educaction.ouvaton