19 mai 2007

Suite (2) de l'analyse
des causes de l'échec
du 6 mai

 

Le parti communiste français

 

La confirmation de l'effondrement électoral du Parti communiste français était prévisible (et d'ailleurs prévu par nous) pour les raisons suivantes :

  • Sans doute un des plus staliniens de tous les "partis communistes" hors de la zone de contrôle direct de l'URSS, il fut un des derniers à se "déstaliniser", et il ne le fit que superficiellement, limitant le stalinisme à la seule dictature de Staline (dite "culte de la personnalité"), et justifiant une grande partie de son histoire, comme si ce système contre-révolutionnaire n'avait été qu'une verrue, certes entraînant quelques erreurs regrettables, mais sur une politique générale juste et progressiste. De ce fait il porta directement le poids du démasquage officiel de ce stalinisme après l'effondrement de l'URSS entraînant celui de tout le système stalinien à la fin des années 80.
  • Cette limite de la déstalinisation tenait au fait que, bien que les plus graves complices de Staline (du guépéoutiste Duclos, au "fils du peuple" Thorez, en passant par le bouffon du bourreau, Aragon) soient déjà morts et enterrés, nombre de dirigeants, aveugles volontaires des pires cours du système tenaient encore en laisse les plus jeunes dans la pyramide hiérarchique dépourvue de toute démocratie. Ainsi les monstruosités du stalinisme pesaient sur tous, y
  • Pire encore, ce refus de rupture totale avec le passé salissait jusqu'aux mots mêmes de communisme, de léninisme, voire de marxisme (voire jusqu'au trotskysme, pourtant la première, la plus constante et radicale opposition au stalinisme).
  • Enfin les vieux staliniens du PCF et ceux qu'ils, avaient formés à leur image se refusant à un retour aux sources du véritable communisme — ce qui les aurait conduits à reconnaître que c'était le trotskysme qui l'avait continué —, évoluèrent au contraire vers une néo-social-démocratie qui, de cahots en cahots la conduisit à la gauche plurielle dont nous connaissons tous la faillite frauduleuse.


Une telle démarche de crabe politique a progressivement fait perdre sa substance à ce parti. Ce furent d'abord ceux (souvent les plus anciens) qui avaient avalé sans broncher tous les mensonges et rejeté les critiques comme calomnies de l'ennemi, et qui tombèrent de leur haut devant les preuves terribles, mais qui rejetèrent l'enfant (trotskyste) avec l'eau du bain. Puis ce furent ceux qui avaient cru trouver une opposition révolutionnaire dans la Guerre froide, et qui, conscience brouillée par le chauvinisme qui allait avec (Marseillaise et drapeau tricolore récupérés), votent maintenant… Le Pen ! Enfin ceux qui avaient cru à la possibilité d'un front de classe PC-PS et qui ont fait l'expérience de la gauche plurielle.

Dans ces dernières années, le PCF avait tout de même commencé à changer. Sans revenir sur son interdiction du droit de tendance, la direction avait dû accepter de reconnaître en fait les courants qui s'y opposaient. Mais ceux-ci allant des vieux staliniens racornis de Gremetz aux authentiques communistes de l'actuelle minorité, cela ne pouvait donner qu'un immobilisme autour de la masse post-stalinienne et social-libérale à fois ouvriériste et souverainiste.

L'échec misérable de la candidature Hue en 2002, puis la victoire unitaire du Non au traité européen a fait naître le courant unitaire autour de Marie George Buffet et à fait naître dans tout le mouvement antilibéral un espoir de déblocage du parti. Mais cela n'aurait pu se réaliser que par un engagement unitaire dépourvu de toute volonté hégémonique. Nous savons ce qu'il en a été.

Mais il faut se demander : Pourquoi cela fut-il ? La bêtise politique ne suffit pas comme réponse. C'est à partir de l'analyse de ce parti que nous venons de faire que l'on peut comprendre le gâchage de la recherche de candidature unitaire à la Présidentielle. Marie George Buffet n'a pu être acceptée d'être candidate du Parti qu'à la condition de ne pas lâcher l'étiquette communiste, puis de participer au mouvement pour les candidatures unitaires qu'à la condition qu'elle serait LA candidate à l'élection la Présidentielle, ce qui ne pouvait qu'aboutir à faire du Mouvement la simple base de masse du PCF ! C'était là un véritable piège imposé par le courant Hue, celui des tenants de la gauche plurielle pour cause de conservation des sièges électoraux. Ou bien elle réussissait, et il y avait une chance de voie de survie pour le Parti, ou bien elle échouait — comme cela arriva — et c'était son échec personnel, dont le courant rival espérait — espère — tirer les épaves du naufrage. Prise dans les filets de ce piège Marie George Buffet a tenté de déjouer l'histoire. Elle a perdu. Mais le PCF a perdu plus qu'elle.

Le plus gros malheur, c'est que leur défaite a été aussi pour nous un grave échec, et celui de tout le peuple de gauche par combinaison avec les responsabilités du PS que nous avons examinées hier. 

La semaine prochaine nous examinerons les responsabilités de la LCR et… les nôtres.


 Débuts sarkoziens 

Comme il l'avait annoncé lors de son débat avec Ségolène Royal, le nouveau Président de la République a réalisé un premier changement, et d'importance : la Ve république de potentiellement présidentialiste devient purement et simplement bonapartiste.

 Le Président va diriger l'État seul et directeme

nt. Il n'a pas nommé un Premier ministre pour former et diriger un gouvernement.  Il a formé un gouvernement, dont un Premier ministre qui ne sera que l'exécutant de ses décisions et son adjoint au contrôle des ministres. Dans le même temps, il a formé à l'Elysée une sorte de second, ou plus exactement premier, appareil d'État (sur lequel nous reviendrons) dont on verra comment il fonctionne par rapport aux ministres, dont certains sont très évidemment d'une légèreté qui exigera qu'ils soient tenus en laisse. Tels sont évidemment le renégat de la gauche molle, Bernard Kouchner, dont le titre ronflant sera probablement l'essentiel de la fonction, et Rachida Dali dont on peut se demander si la nomination à un tel poste n'est pas une manière de dire au pouvoir judiciaire le cas qu'il fait de lui.

Le bonapartisme (très napoléonien) est également visible à la manière dont Naboléon Sarkozy traite son opposition. D'un côté il punit le "démocrate" Bayrou, dont un seul membre de son UDF est dans le gouvernement, de l'autre il inflige au Parti socialiste l'affront de promouvoir deux de ses traîtres (dont le plus sale : Éric Besson), feignant ainsi une fausse ouverture à gauche, puisqu'il s'agit de gens passés d'une demi-gauche à la droite, comme il y en a eu de tout temps. (À suivre).



Le Journal intempestif est heureux
de vous rappeler la parution de


LE TROTSKISME
UNE HISTOIRE SANS FARD

De son rédacteur
Michel Lequenne
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